mercredi 5 septembre 2007

• Le sage repose dans le Soi - Annamalai Swâmì

Sources

Le sage repose dans le Soi
Annamalai Swâmì

Lorsque nous nous disons : " Je dois méditer ", ou " Je dois faire un effort " nous ne faisons qu’organiser un combat entre deux inclinations, ou tendances, différentes. Votre seul échappatoire face aux habitudes du mental est de demeurer dans la conscience en tant que conscience même. Soyez qui vous êtes. Soyez tels que vous êtes. Restez simplement immobiles et silencieux. Ne prêtez aucune attention aux inclinations mentales, ou tendances, et fixez plutôt votre attention au sein du Soi.


Dès son plus jeune âge, Annamalai Swâmì consacrait la plupart de son temps à la prière et à la méditation. A l'âge de vingt ans une photo de Ramana Maharshi exerça un tel impact sur lui qu'il quitta son village sur le champ pour se rendre auprès du sage à Arunanchala. Il ne quitta plus l'endroit pendant les septante années qu'il lui restait à vivre.

Tout d'abord, pendant une dizaine d'années il travailla au service de Ramana en qualité de contremaître et dirigea à ce titre la construction des principaux bâtiments de Ramanasramam. Puis, après avoir vécu l'expérience du Soi, il se retira à Palakottu à quelques deux cents mètres de Ramanasramam et s'employa à se stabiliser dans cet état.

Pendant les premières années, il se rendait encore dans le Hall de Ramana pour bénéficier de son darshan [1] et fut ponctuellement invité par Ramana lui-même à quitter sa retraite pour venir superviser des travaux à l'ashram, jusqu'à ce qu'un soir, pendant le darshan, Ramana se tourne vers lui et lui dise : "Vous êtes une personne indépendante. Vous êtes une personne indépendante. Vous êtes une personne indépendante. Vos karmas [2] sont finis. Désormais, personne, qu'il soit un roi, un deva [3], un asura [4]ou un être humain, ne vous commandera ni ne vous dira quoi faire." En entendant ces mots, Annamalai Swâmî ressentit un grand sentiment de force et de paix et se sentit soulagé à l'idée de n'avoir plus à venir travailler à l'ashram.

Quelques années plus tard, dans les années 1940, Ramana lui donna l'indication de ne plus venir à l'ashram : "Si l'on a pas foi en Dieu, on commet beaucoup de péchés et on est malheureux. Mais vous, vous êtes un dévôt parvenu à maturité. La maturité a ses lois : si dans cet état de maturité, on pense être séparé de Dieu, on tombe dans le même état qu'un athée qui n'a pas foi en Dieu. Vous êtes un sâdhaka [5] parvenu à maturité. Vous n'avez plus besoin de venir ici. Restez à Palakottu et faites votre méditation là-bas. Essayez d'effacer l'idée que vous êtes différent de Dieu."

Annamalai Swâmî partit et respecta scrupuleusement la consigne : bien que vivant à moins de deux cents mètres de l'ashram, il n'y fit plus la moindre visite jusqu'à sa mort en novembre 1995.

Vingt jours plus tard, Bhagavan [6] passa le voir et lui dit en souriant : "Je suis venu pour votre darshan" et ajouta, devant l'air choqué d'Annamalai Swâmî : "Vous avez obéi à mes paroles. Vous vivez simplement et humblement comme je l'ai enseigné. N'est-ce pas magnifique ?"

Quelques jours plus tard, fin du sevrage ; alors qu'Annamalai Swâmî s'approchait de Ramana de passage à Palakottu, ce dernier se tourna vers lui et lui dit : "Vous êtes plus heureux que moi. Ce que vous aviez à donner, vous l'avez donné. Ce que j'avais à donner, je l'ai donné. Pourquoi venez-vous encore me voir ?"

A dater de ce jour, Annamalai Swâmî n'essaya plus d'approcher Ramana ni de lui parler. Si leurs chemins se croisaient, Ramana passait sans relever sa présence. Annamalai Swâmî ne s'en formalisait pas. Il avait compris que ce faisant, Ramana l'invitait à ne pas le considérer comme un être personnel et à prendre conscience de lui tel qu'il est réellement, sans nom ni forme. Il se souvenait de ce que Bhagavan lui avait dit un jour : " Ne vous accrochez pas à la forme du Gourou : elle périra ; ne vous accrochez pas à ses pieds : ses serviteurs vous arrêteront. Le vrai Bhagavan réside dans votre coeur comme votre propre Soi. Voilà qui je suis vraiment."

Dès lors Annamalai Swâmî s'employa à rester en contact avec le vrai Bhagavan, le Bhagavan qui vit éternellement dans le coeur.

Il vécut à Palakottu jusqu'à la fin de sa vie. Immergé dans le Soi, il y mena une vie simple et paisible.

Depuis le milieu des années 1940 jusqu'à sa mort, jamais il ne quitta Palakottu. Il ne sortait de chez lui que pour de brèves promenades sur les pentes basses d'Arunâchala ou dans la forêt voisine.

Pendant les dernières années de sa vie, de nombreux visiteurs, surtout des Occidentaux, venaient le voir, attirés par la puissance de son silence, la paix, la clarté et l'harmonie qui régnaient autour de lui. Il partageait avec eux son amour pour Bhagavan et sa parfaite connaissance de ses enseignements. Il leur donnait aussi des conseils et des instructions pour leur pratique spirituelle, et les guidait sur la voie de la réalisation avec beaucoup d'amour et d'humour.

Annamalai Swâmî est mort paisiblement le 9 novembre 1995 à 4h 45 du matin, après dix jours de maladie. La veille, deux de ses disciples lui demandèrent : " Swâmî, votre corps souffre beaucoup. Qu'en est-il de votre mental ?" Il répondit : "Quelles que soient les souffrances endurées par son corps, le sage repose dans le Soi."

[1] La vision. Les hindous attachent une grande importance au fait de voir un sage, ce qui est une aide précieuse sur la voie de la réalisation. C'était la "fonction de présence" de Ramana Maharshi que d'incarner aux yeux de tous le Soi. "Darshan implique drashtâ (le voyant). Cherchez ce dernier et vous découvrirez que la vision est incluse en lui."
[2] Fruits des actions passées

[3] Esprit bienveillant

[4] Esprit violent et agressif

[5] Chercheur spirituel

[6] Sage présentant l'attribut essentiel de la divinité : l'absence d'ego. Nom donné à Ramana Maharshi.

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